Extraits philosophiques

Autour de la peur

L’homme a toujours voulu expliquer le monde. Plus encore, il a cherché à comprendre l’être humain et sa nature, son fonctionnement, son mécanisme. Pour cela, il s’est formé des images, des modèles, des moyens de manipuler mentalement une créature incroyablement complexe. Obnubilé par sa soif de vérité, l’homme a exploré différentes voies, descendant de plus en plus profondément dans des puits de plus en plus étroits, présentant chaque fois des visions parcellaires en prétendant nommer le tout.
Cela semble particulièrement vrai pour ce qui concerne la compréhension du fonctionnement psychique. De tout temps, les « médecins de l’âme» ont tenté de guérir leurs patients en utilisant des modèles présentés comme des vérités. Ainsi se sont construites des « chapelles». D’un côté, la psychanalyse, la PNL, l’analyse transactionnelle, les constellations familiales, l’analyse systémique, les thérapies brèves … D’un autre côté, les approches énergétiques, comme la kinésiologie, le reiki ou le magnétisme. Ou encore les voies dites spirituelles …
Chacun a découvert la solution. Une vérité devient un dogme à explorer et devant être observé absolument par les pratiquants.

Cela conduit à penser les choses en termes de vrai ou faux. Mais alors, avec tant de vérités, pour quelles raisons les peurs continuent-elles aujourd’hui d’imposer leur loi? Pourquoi la paix déserte-t-elle encore le cœur des hommes? Pourquoi, après des années de psychanalyse, de méditation, de thérapie, de consultations familiales … le mal-être et la frustration sont-ils toujours présents?
Et si la solution se trouvait dans l’énoncé du problème?

Et si la recherche de la vérité en tenait l’homme éloigné? Et si la nature de l’homme était un mystère insondable? L’anthropologue américain Carlos Castaneda ne disait-il pas que « nous devons essayer de déchiffrer le mystère sans avoir le plus petitespoir d’y parvenir» ?
Si la nature de l’homme est impénétrable, ne devrions nous pas faire le deuil de la vérité et nous concentrer sur le but à atteindre, à savoir la guérison des peurs et le bonheur? La seule question ne serait plus alors « Est-ce que mon analyse est vraie? » mais « Est-ce que ma solution fonctionne? ».
Débarrassons-nous de l’obsession de la vérité et concentrons-nous sur l’efficacité. Pour cela, il nous faut être simples. Toutes les grandes créations de l’homme sont marquées du même sceau: que ce soit dans l’art, l’industrie ou la science, beauté et efficacité ont toujours rimé avec simplicité. Le naturaliste Henry Thoreau l’avait même élevée en credo: « Simplifiez, simplifiez, simplifiez. » Un portrait de Vermeer, le Post-it, les freins à disque, une fugue de Bach … Tous portent ce label.
Simplifier sa vie, sa pensée est un exercice difficile à l’homme qui a une tendance spontanée à compliquer. On croit que si des propos peuvent être compris par un enfant de huit ans, ils ne possèdent aucune valeur. J’ai fait un autre choix. Ce livre offre une représentation simple de la mécanique des peurs de l’homme. Elle est intelligible à un enfant (de huit ans) et elle fonctionne.
C’est une vision de l’être humain plus facile à utiliser et plus libératrice que la psychanalyse, et moins culpabilisante que la doctrine judéo-chrétienne. Elle est conçue de telle sorte que chacun puisse s’en saisir, que ce soit à titre individuel pour comprendre et se libérer de l’emprise de ses peurs, ou en tant que thérapeute pour enrichir une approche et une façon de travailler. Je l’ai pratiquée depuis des années sur des centaines de personnes.

Plus de peur que de mal.
André Charbonnier.
Points, 2016.

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